François d’Assise et Ibn ‘Arabi
- annelauwersblum
- il y a 2 jours
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Dans sa chronique hebdo sur France-Inter, le philosophe Charles Pépin répondait à la question de savoir si la foi en un Dieu était obligatoirement de la folie (lien en annexe). Sa réponse a été OUI. C’est une folie, mais c’est justement ça qui est beau ! Si l’existence de Dieu était démontrée, on n’aurait pas besoin de croire. Avoir la foi, c’est oser faire un saut dans l’inconnu, dans le mystère. C’est oser dire, je ne sais pas si c’est vrai, mais j’aime ! Tandis qu’affirmer des Vérités qu’il est interdit de remettre en question mène à l’intolérance, aux fanatismes religieux.
La chronique pascale de Charles Pépin (et la mort du pape deux jours plus tard), m’a rappelé les vies folles de François d’Assise et du grand mystique soufi, poète et scientifique, Ibn ‘Arabi. Tous deux vivaient au XIIᵉ siècle, tous deux ont été touchés par l’incandescence de l’amour, tous deux vivaient leur foi en hommes libres. François à Assise, Ibn ‘Arabi à Damas (ea). François aimait Claire, Ibn ‘Arabi aimait Myriam. François parlait aux animaux, Ibn ‘Arabi plaçait au cœur de sa foi — au cœur de l’organe cœur ! — l’imagination créatrice nécessaire pour entretenir la flamme de l’amour.
Après avoir vécu il y a quarante ans une expérience de mort imminente, j’ai voulu adhérer à cette folie de l’amour transcendantal, paradoxal, en me faisant baptiser dans la religion chrétienne. J’avais fait une rencontre. Rencontre étrange qui n’était ni quelqu’un, ni quelque chose, qui ne ressemble à rien de ce que j’ai pu vivre, ressentir jusqu’à aujourd’hui. Très vite, les certitudes/habitudes de la religion, le corsetage de l’église (sans même parler de ses perversions sectaires!), ses mots étroits et secs, m’ont rebuté. « Ne jetez pas le bébé avec l’eau du bain », dit l’adage. J’ai gardé le bébé, l’eau et la baignoire de la religion et de l’église, je les ai jeté.
La folie des mystiques demande de l’audace, du renoncement, de l’abnégation, de la persévérance, du prosélytisme (du militantisme?), et… de l’abandon. Qualités que mon insouciance pragmatique a observé avec émerveillement, et un zeste d’effroi. Ma rencontre, la joie mystérieuse des mystiques, a toutefois laissé une trace au plus profond de moi. Soyons fous ! Soyons folles ! L’expression dit très bien ce qu’elle veut dire. Il est parfois bon de laisser de côté notre rationalité pour plonger dans un bain frémissant d’inconnu, avec la seule certitude qu’on en sortira vivifié, comme d'une cascade d'eau froide. Sans doute avec un peu plus de joie chevillée au corps!
Texte et photo: Anna Blum
"In C" de Terry Riley, un saut dans l'inconnu réjouissant!
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