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  • annelauwersblum

Des rois, des reines, des phoques et des dauphins



Voici quelques jours, un vieil ami druide à la barbe blanche m’envoyait une missive proprement stupéfiante.

« Lu récemment brève d'une île située au nord-ouest de l'Écosse, en mer d'Irlande. Le Conseil de l'île de Piel (20 ha) engage un.e aubergiste pour une période de 10 ans. Sa tâche ? S'occuper de Ship Inn, la seule taverne de l’île. L’élu.e sera nommé.e Roi ou Reine du lieu. Lors de son intronisation, l’heureux.se s’assiéra sur un trône avant d’être copieusement arrosé.e de ... bière! » La missive se terminait en m’enjoignant de vérifier l’information sur le net.

Mon moteur de recherche qui plante des arbres, épingla en effet une série de dépêches, toutes aussi explicites les unes que les autres.

J’appris en sus que la personne retenue devrait s’occuper de l’entretien d’un château en ruines, ainsi que jeter un œil bienveillant sur une colonie de phoques, batifolant dans les baies et sur les plages de l’île.

Tout en lisant son message, je l’imaginai, lui et sa dame, cingler toutes voiles dehors vers de nouvelles aventures. N’avaient-ils pas tenu, eux aussi, une taverne sur la terre ferme pendant beaucoup d’années ?

L’appât était alléchant :

être, pour une durée de dix ans, l’égal de sa majestueuse la Reine d’Angleterre !

Converser le cas échéant avec les grands de ce monde, en sirotant de la bière écossaise à côté d’un château hanté !

S’asseoir sur un trône (même si celui-ci s’avérait être pour les besoins une vulgaire toilette sèche) !

Entretenir des relations de bon voisinage avec des phoques!

Je l’imaginai enfin récupérer avec astuce la bière versée sur sa couronne (parce que pour un druide il est des breuvages qu’on ne gaspille pas).

Je me vis tout aussi promptement embarquer sur un raffiot en compagnie de celui qui partage ma vie, pour leur rendre visite. Et en un tournemain, je me retrouvai sur un autre bateau, fendant les flots vers l’ïle de Chausey, nos quatre mômes penchés par-dessus le bastingage, au point qu’on voyait leur fond de culotte usé. Une bande de dauphins escortaient la vedette, venait s’y frotter, donnait des coups de museau ou de queue dans la coque, pour la plus grande joie des enfants et de leur parents.

Après avoir lu la missive de notre ami, je me retrouvai en proie à une grande excitation. De celle qui nous fait fondre de bonheur, d’admiration et d’amour devant les merveilles de la nature, devant l’époustouflant spectacle d’animaux marins. Leur façon espiègle de nous aborder, de nous inviter au jeu. De nous traiter d’égal à égal avec beaucoup de générosité, alors que nous nous montrons si souvent cruels envers les bêtes...

Être dix ans durant Roi ou Reine de phoques et de dauphins, n’est pas donné à tout le monde. Il y faut un sacré caractère, du culot, un amour profond et désintéressé du vivant, une dose inépuisable d’émerveillement.

Avis aux amateurs !


Anna Blum



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