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La doula, une accompagnatrice à la Naissance

Aurélie Vuinée

 

D'Alsace-Lorraine, la vie nomade d'Aurélie l'a menée en Inde, d'abord en tant que bénévole suite à la catastrophe du tsunami, puis dans un ashram afin de s'y former au hatha-yoga. De retour en France, c'est en Ariège qu'elle a suivi une formation d'éducatrice. Elle y a travaillé pour différentes associations d'aide aux personnes en difficulté, avant de s'installer et de se fixer dans le Diois, un vrai toit au-dessus de sa tête !

 

 

Anna Blum : Aurélie, que signifie le mot « doula », que fait une doula ?

 

Aurélie Vuinée : le mot provient du grec ancien. Dans la mythologie il est question d'une femme appelée « doula », qui aurait été une esclave. Le mythe s'est pourtant révélé réel à l'époque romaine. En ce temps-là, des femmes servaient et accompagnaient d'autres femmes tout au long de leur vie, à travers les soins, la beauté, les accouchements, l'accompagnement postnatal. La doula contemporaine accompagne la naissance d'un être à la vie. Les doulas existent depuis les années soixante-dix aux États-Unis et en Angleterre, même si elles se sont donné d'autres noms (accompagnatrice périnatale ou accompagnatrice à la naissance, par exemple). On retrouve ces pratiques d'accompagnement au moment de l'accouchement dans beaucoup de tribus.

 

AB : on est loin de l'image de la femme qui, ayant accouché, se remet tout de suite au travail, son bébé ligoté sur le dos !

 

AV : c'est sûr que souvent, quand la femme ne travaillait pas, la famille n'était pas nourrie. Il faut dire que la société basée sur le profit a balayé ce genre de rituels. Mais, la sororité, cette solidarité entre femmes, a perduré dans certaines cultures. Dans l'histoire de l'Europe, cette période était d'ailleurs appelée « relevailles » et durait quarante jours. Depuis quelques années, des femmes ont voulu remettre à l'honneur cette pratique, ce rituel. Des femmes ayant eu des enfants avaient le désir d'aider celles qui allaient devenir mamans.

 

AB : ce n'est pas le rôle des sages-femmes ?

 

AV : dans l'idéal ce pourrait être le rôle de toutes les femmes. Mais la doula

apporte du soutien dans la vie quotidienne sous tous ses aspects pratiques.

Ce métier (qui n'est pas reconnu!) s'est surtout développé en Angleterre où

existe une formation depuis vingt ans. En fait, les doulas ont pu prendre place

là où existait un vide. La fonction est réapparue suite à un besoin.

Les parents font de plus en plus appel à notre présence dans le paysage de la

naissance. Le rôle d'accompagnement de la doula commence dès la concep-

tion et se perpétue jusqu'après la naissance, parfois jusqu'à six ou neuf mois.

 

AB : elle ne tient pas la chandelle près du lit pour autant ?

 

AV : disons, juste après ! On rit, mais la doula peut aussi accompagner par

sa simple présence, son écoute, sa complicité, sa disponibilité, celles qui ont

des difficultés à concevoir, une IVG, ou un deuil périnatal... Le plus beau

c'est quand on peut accompagner tout un parcours qui aboutit à la naissance

d'un petit être.

 

AB : la doula peut aussi intervenir auprès du papa ?

AV : oui, elle vient soutenir la maman et son entourage. Elle peut par exemple

garder la fratrie pendant que le papa assiste à l'accouchement, ou intervenir

sur son appel s'il se sent complètement débordé.

 

AB : comment en es-tu arrivée à vouloir accompagner des femmes dans cette aventure qu'est donner la vie ?

 

AV : l'accompagnement en tant que tel a toujours été présent dans ma vie. J'ai d'abord travaillé avec des enfants puis en tant qu'éducatrice, avec des personnes en difficulté. Du handicap à l'aide sociale sous toutes ses formes.

À un moment donné, au lieu d'accompagner la difficulté, la tristesse, les choses dures qui font mal, j'ai eu envie d'accompagner la vie ! À cemoment-là, la danse, la joie d'être présente dans chacune des cellules de mon corps, est venue confirmer cette envie. Ensuite s'est posée la question du choix entre sage-femme et doula. C'est l'expérience de ma propre maternité qui m'a fait choisir la formation de doula. Même si j'avais été très bien accompagnée par Florian, le père de notre enfant, par ma famille, ma sage-femme, il m'a manqué la présence d'une femme « neutre ». Une personne que je pouvais appeler n'importe quand, dont je connaissais la disponibilité, la générosité et que j'avais juste envie de voir pour boire un thé avec elle par exemple...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AB : tu proposes différentes portes d'entrée à ton accompagnement à la naissance ?

 

AV : j'ai en effet plusieurs casquettes. Doula est un accompagnement à domicile spécialisé autour de la natalité, pour lequel je suis payée en chèques service. Ça se pratique sur rendez-vous et l'aide peut prendre toutes sortes de formes, y compris par exemple garder le bébé quand la maman veut prendre une douche à l'aise et que le papa n'est pas présent, cuisiner ou soutenir l'allaitement. Une autre casquette concerne les ateliers naissance, au sein de l' association « Ressources Parentalité 26 » à Die, qui est une association tournée vers la parentalité positive. J'y suis prestataire de service en yoga prénatal et massage pour bébé. Je m'étais formée au hatha-yoga en Inde et pendant ma grossesse, j'ai suivi les stages de yoga prénatal de Martine Texier, une personne de référence dans cette spécialisation.

 

AB : le fait d'avoir eu un enfant a changé ton approche dans l'accompagnement à la naissance ?

 

AV : avant mon accouchement, je savais que c'était ce que je voulais faire, mais j'en ignorais encore la forme. Tout au long de ma grossesse, durant laquelle j'ai beaucoup rêvé d'Elouan, vécu des choses qu'on pourrait qualifier de « mystiques », mais qui sont normales quand on porte la vie, j'étais très confiante. J'avais confiance en mon corps, en ce savoir transmis par les milliards de femmes qui avaient accouché avant moi. Mais, malgré cette confiance, malgré le yoga, malgré mon bien-être et ma bonne préparation, la dernière heure des douze heures qu'a duré mon accouchement a été traumatisante. J'ai dû requestionner ce moment, comprendre pourquoi je n'avais pas su accueillir cette douleur qui m'a fait craindre la mort. Je ne pouvais pas accompagner d'autres femmes et garder ce traumatisme en moi. Il m'a fallu m'en libérer. Cette histoire a ensuite pris place dans l'accompagnement que je pouvais proposer. Mon désir est de soutenir d'autres couples, d'autres femmes ou des pères dans cette aventure. Je n'ai pas la prétention de croire que je vais les libérer, je peux juste être soutenante. Et puis, ma grossesse m'a fait comprendre que c'était à cet endroit-là que je voulais agir dans le monde. Je me sens à ma place quand je peux mettre de l'amour avec un grand A au moment précis où naît la vie. C'est ainsi que je me sens pleinement accomplie et épanouie !

 

Lien vers le site "Ressources Parentalité 26", pour une éducation bienveillante: http://www.ressources-parentalite.fr

Lien vers le site des doulas: http://doulas.info

 

 

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